Livraison gratuite en France pour les commandes de 50 € et plus

The Green Leaf Thief

Le Conte de Teigen

Once upon a time,

Il y a bien longtemps, dans le royaume ensoleillé de Pléonexia — une terre autrefois imprégnée d’une grande magie — le soleil brillait sans relâche, et les plantes, les humains, ainsi que les esprits vivaient en parfaite harmonie.
Cela dura… jusqu’au jour où cinq des dragons les plus riches du royaume établirent leur demeure dans les montagnes voisines.
Ces êtres immortels, mus par la cupidité et la ruse, répandirent leur influence comme un poison, se nourrissant des faibles et des égoïstes pour assouvir leur insatiable appétit magique.
Ils murmuraient des promesses de richesse et de pouvoir au-delà de toute mesure à ceux prêts à leur céder leur magie en échange.

Mais la cupidité, telle une peste, se répandit sans frein.
Bientôt, Pléonexia devint un royaume de thésaurisation et d’exploitation.

Avec le temps, seuls les dragons décidèrent de la valeur de la magie — déterminant qui méritait la richesse et le pouvoir, et qui serait relégué à l’ombre. Le peuple fut divisé.
Ceux qui abandonnaient leur magie obtenaient de hautes fonctions dans la société, tandis que les autres sombraient dans l’oubli.

La guerre civile ne tarda pas à éclater.
Dans les quartiers pauvres, les habitants accusaient leurs voisins de ne pas avoir su gagner la faveur des dragons, et la méfiance engloutit le royaume.
Pendant des siècles, les dragons régnèrent en rois, se nourrissant de discorde et de souffrance. La maladie se répandit. La paranoïa s’enracina.

Les plantes, jadis libres de pousser à leur gré, furent désormais accumulées, marchandées comme de simples biens. Les pauvres étaient traités comme des déchets, et les esprits — autrefois bienveillants et omniprésents — s’évanouirent dans l’oubli, leur bonté effacée des mémoires.

Ainsi, après des générations de conflits insensés, les humains porteurs de magie, les herbes, et même les esprits doux se retirèrent, fuyant un monde qui ne croyait plus en eux.
Les enchantements, les herbes de guérison, et les simples gestes de bonté devinrent rares à Pléonexia.

Partie 1

Dans l’ombre de cette cité rongée par la cupidité, un garçon nommé Teigen naquit de sa mère, Melissa.

Teigen était une âme sincèrement joyeuse, malgré une lutte constante contre ce que sa mère appelait affectueusement le « syndrome du Maladro-Boum » — une affection incurable où portes, murs, et même la gravité semblaient ligués contre lui.

Melissa, quant à elle, était une guérisseuse d’exception, connue pour son hospitalité débordante et sa compassion inébranlable. Son esprit était indomptable, et elle éleva Teigen à son image. Leur humble demeure vibrait de magie, mais tous ceux qui y vivaient devaient rester cachés, loin des regards inquisiteurs des dragons.

Teigen trébucha jusqu’à l’âge adulte aux côtés de sa plus fidèle compagne : Camélia, une malicieuse feuille de thé vert qui infusait les tisanes les plus apaisantes et clarifiantes qu’on ait jamais goûtées. Avec les esprits invisibles du foyer — qui rendaient chaque tasse de thé plus puissante et chaque éclat de rire plus fort — ils bâtirent ensemble une vie pleine de chaleur, malgré l’ombre glaciale de Pléonexia.

La plupart du temps, Teigen aidait Melissa dans ses soins. Mais ce genre de magie était interdit.

Ne croyant pas posséder de pouvoir propre, Teigen, avec Camélia dans sa poche, prenait tous les risques : il faisait passer des herbes, des potions et des remèdes en contrebande.

Qu’il s’agît de soigner des familles assoiffées par la sécheresse ou de fournir un thé empoisonné à un époux particulièrement rancunier, jamais ils ne refusaient une âme en détresse.

Quand le chaos de la ville devenait trop lourd, Teigen et Camélia s’échappaient vers une colline secrète, où un étang d’eau pure scintillait au pied d’un vieux saule.

Là, Saule, aussi ancien que silencieux, dansait doucement au bord de l’eau. Il ne parlait pas la langue des humains, mais communique par le mouvement de ses branches — témoin discret de leurs espoirs et de leurs craintes au fil des ans.

En ce lieu, Teigen se sentait libre.

Camélia virevoltait autour de lui, sa magie libérée, comme si le poids des secrets de la ville fondait dans l’air.

Mais Teigen ne pouvait se défaire d’un sentiment lancinant : le monde tournait de travers. Il en avait assez de vivre caché.

Un soir fatidique, après une livraison qui tourna au désastre (impliquant une fenêtre mal calculée et une horde de nobles furieux), Teigen se traîna jusqu’à la colline, couvert d’ecchymoses et de sang.

« J’en ai marre, Camélia ! », cria-t-il en faisant les cent pas sous l’ombre du Saule. « On ne devrait pas avoir à se cacher ! On fait le bien, et on nous punit pour ça ! »

Camélia, aussi calme qu’une infusion parfaite, sortit de sa poche. Sa forme délicate attrapa la lumière du soleil. Elle salua silencieusement leur vieil ami feuillu, puis se tourna vers Teigen :

« Un jour viendra, mon ami sincère, où tu prendras cœur, sans plus de mystère.»

dit-elle doucement. « Le moment viendra, trop c’est trop, et les lâches tomberont de haut.

Tu devras choisir, ouvrir les yeux et tu verras l’homme que tu es, glorieux. »

Teigen gémit en se laissant tomber contre le tronc du Saule.

« Cam, tu pourrais essayer de donner une réponse claire, pour une fois. »

Camélia se contenta de sourire, tandis qu’une branche du Saule venait doucement lui tapoter la joue comme pour lui dire : « Écoute, petit. »

Mais alors, avec un sérieux peu habituel, la feuille verte prépara une tasse de son thé, la pressant entre les mains de Teigen. Lorsqu’il but, une vague de guérison lui traversa la poitrine, et ses blessures se calmèrent, moins enflammées.

« Ta mère a trouvé leur point faible, tu vois, et grâce à cela, on s’échappera. »

Teigen se redressa d’un coup, le cœur battant. Une faiblesse ? Les dragons ?


Mais avant qu’il ne puisse l’interroger davantage, Camélia se mit à trembler, sa voix devenant fragile.

« Teigen… le prix à payer sera cruel, mais une fois versé, ils chuteront du ciel. »

Sentant qu’elle avait besoin de réconfort, le jeune homme maladroit s’assit à côté de son amie de toujours, la tenant contre lui tandis que les branches apaisantes de Saule se posaient doucement sur ses épaules.

Confus, certes — mais il ne pouvait que chérir ce moment de calme partagé.

Camélia se dégagea lentement de ses bras, sa frêle silhouette frémissante.

Elle le regarda avec plus d’intensité qu’il n’en avait jamais vu, et dit :

« Souviens-toi bien de ce que je dis,

Car c’est le seul chemin, je te le dis.

Tu trouveras, sur ta quête sincère,

Une femme en vert, au regard clair.

Sous sa capuche, une beauté cachée,

Te posera une question à deviner.

Mais si ta réponse tombe à côté…

Nul gong ne viendra sonner. »

Tremblant à son tour, Teigen s’exclama presque :

 « Un gong? Quel gong? Cam, s’il te plaît ! Sois plus claire ! D’où ça sort, tout ça ? »

Les larmes aux yeux, la voix de Camélia s’adoucit encore.

« Teigen, retiens bien ce que je dis : Un simple geste peut tout changer ici. Même petit, s’il vient du cœur, il peut guérir nos plus grandes peurs. »

Il la fixa, complètement perdu dans le poids de ses paroles, mais parvint à répondre :

« Je serai toujours bon avec toi, ma Verte. »

La petite feuille verte hocha doucement la tête, puis tourna son regard vers l’horizon où le soleil commençait à disparaître.

« Je sais, » murmura-t-elle.

Sur ces mots, Camélia se dissipa dans l’air, et les branches de Saule retombèrent, inertes. Le ciel vira lentement au gris terne, des nuages épais s’amassant au-dessus d’eux, effaçant entièrement le soleil.

Partie 2

Teigen resta figé, incapable de bouger. Non seulement à cause du changement brutal de temps ou de la disparition de son amie, mais à cause de la révélation la plus bouleversante de toutes :

Camélia avait parlé clairement. Sans énigme. Sans rime.

Lorsque ses membres se décidèrent enfin à lui obéir, un terrible sentiment prit racine dans sa poitrine. Un froid, profond. Une peur sourde.

Il hurla dans le vide, appelant ses amis, mais aucune réponse ne vint.

Saule avait disparu.

L’étang était sec, craquelé.

Camélia s’était évanouie.

Paniqué, Teigen se mit à courir, dévalant la colline en trébuchant si violemment qu’il crut s’être fêlé une ou deux côtes.

Ignorant la douleur, il courut jusqu’à chez lui, le souffle court, le cœur battant à tout rompre…

pour découvrir sa mère, Melissa, effondrée sur le sol de la cuisine, secouée par une toux violente.

Aucun esprit en vue.

L’horreur le saisit en voyant Melissa faiblir à vue d’œil.

Pris de panique, Teigen fouilla frénétiquement leurs étagères, essayant remède après remède pour faire tomber sa fièvre. Mais, quelle que soit la potion qu’il préparait ou les herbes qu’il mélangeait, rien ne fonctionnait.

Désespéré, il courut jusqu’à l’apothicaire, suppliant les soi-disant Hommes-Médecine de Pléonexia.Mais ces hommes étaient les plus vils de la cité : arrogants, corrompus, leur fortune bâtie sur la souffrance des autres. Ils emprisonnaient plantes et esprits, siphonnant leur magie pour vendre des soins seulement à ceux qui pouvaient les payer, se proclamant comme les seuls détenteurs de remèdes sacrés.

Les appels de Teigen tombèrent dans l’oreille de sourds.

Il n’avait rien à offrir : ni argent, ni statut.

Le plus vieux des apothicaires ricana en le poussant hors de l’échoppe :

 « Ceux qui naissent dans la crasse, vivent dans la crasse… et meurent dans la crasse. »

La porte claqua derrière lui.

Cette nuit-là, le cœur brisé, Teigen berça sa mère inconsciente, sa voix tremblante alors qu’il chantait la chanson de Camélia.

Ce qui avait autrefois été une mélodie joyeuse d’espoir lui semblait désormais lourd, chaque mot pesant comme une pierre :

« Porté par l’amour, il pleure, il veille,

Dans le secret, il brise les veilles.

Debout, il s’élève, porté par la foi,

Voleur de nuit, il leur rendra la voie. »

Le souvenir de Camélia tournoyant autour de lui, riant, chantant cette même chanson, élargit encore la plaie dans sa poitrine.

Les heures passèrent avant que Melissa ne bouge enfin. Ses paupières papillonnèrent, et elle ouvrit les yeux.

Pâle, affaiblie, mais toujours pleine d’amour, elle leva le regard vers lui avec cette expression familière, douce et inaltérée. Sa voix, faible mais claire, murmura :

« La gentillesse apporte l’équilibre. Le sacrifice apporte le changement. Camélia est la clé. »

Et dans un dernier souffle, son esprit s’échappa.

Des fleurs s’épanouirent doucement là où elle reposait, nichées tendrement dans les bras de Teigen.

Un sanglot brut, déchiré, s’échappa de sa gorge alors qu’il serrait les fleurs contre lui.

Sa douleur s’étendit dans la nuit, résonnant bien au-delà des murs de leur maison.

Il avait l’impression que la rage allait le consumer entièrement.

Son cœur brûlait sous le poids de la perte…

Jusqu’à ce qu’un souvenir perce la brume du chagrin.

Camélia. Sa clarté. La chanson.

Teigen se figea, le souffle court.

« La chanson… » murmura-t-il d’une voix rauque. « La chanson est la clé ! »

Cherchant à apaiser son cœur battant, Teigen inspira longuement. Son regard parcourut la belle demeure que sa mère avait bâtie pour eux.

Un lieu où l’amour et les rires avaient fleuri — non pas grâce à l’or ou aux bijoux, mais grâce à la chaleur, à la bonté, et aux souvenirs partagés.

Les échos de chants et de danses d’un passé lointain semblaient encore vibrer dans les murs, emplissant le silence d’une douce nostalgie.

Et à cet instant, il sut ce qu’il devait faire.

« Trop, c’est trop, » murmura-t-il, la voix ferme et résolue.

Saisissant son manteau, Teigen se précipita vers la porte… pour se cogner violemment la tête contre le chambranle en sortant.

Grommelant de douleur et se frottant le front (qui, sans aucun doute, porterait un bleu dès le lendemain), il prit une profonde inspiration et se retourna vers la maison.

Se tenant droit, les bras écartés, il déclara avec une conviction inébranlable :

« Cette maison sera à jamais un refuge pour toute magie. Je la remplirai à nouveau d’amour, et elle restera un sanctuaire pour tout ce qui est vert… et invisible. »

Sur ces mots, il abaissa brusquement les bras, les croisant devant sa poitrine comme pour sceller un serment.

Un craquement soudain fendit le ciel.

Un éclair — phénomène inconnu dans ce royaume baigné de soleil — illumina les cieux avec une puissance aveuglante.

Le sol trembla sous ses pieds, et l’air vibra d’une énergie ancienne.

Alors que l’écho du tonnerre s’évanouissait, la maison devant lui se transforma. Ses contours se floutèrent, se fondant dans une brume douce, comme si l’édifice lui-même s’était soustrait au regard du monde.

Teigen cligna des yeux, le souffle coupé.

Puis, contre toute attente, un rire étranglé lui échappa — à moitié incrédule, à moitié émerveillé — stupéfait par la force brute de la nature… et par le fait que, d’une manière ou d’une autre, cela avait fonctionné.

Il avait de la magie.

Partie 3

Teigen, toujours aussi maladroit et dégingandé, consacra alors sa vie à redonner vie à la magie dans sa maison et mena une guerre silencieuse mais tenace contre les puissants.

Nuit après nuit, sous le couvert de l’obscurité, il libérait tout ce qui était vert et caché : esprits, plantes, et magies oubliées, longtemps enfermés par la cupidité.

Il se faisait presque toujours repérer… ou, plus exactement, presque voir.

Sa maladresse légendaire laissait derrière lui un sillage de charrettes renversées, de vases brisés, et parfois même d’armoires culbutées au passage de ses évasions téméraires.

Ses cambriolages chaotiques mais inoubliables lui valurent un surnom devenu légende :

Le Voleur à la Feuille Verte.

Pendant de nombreuses années, grâce à la magie tissée ce jour-là, le ciel de Pléonexia resta couvert — d’un gris constant et orageux.

Les dragons, adorateurs d’un soleil éternel, ne pouvaient plus se prélasser dans les rayons dorés qu’ils convoitaient tant.

Un à un, les immortels quittèrent le royaume, emportant leur avidité et leurs trésors pour aller tourmenter d’autres terres plus lumineuses.

À mesure que l’influence des dragons s’éteignait, le peuple de Pléonexia redécouvrit ce que cela signifiait de se tourner les uns vers les autres.

La gentillesse, les enchantements, et les simples gestes de bonté, autrefois devenus rares, fleurirent à nouveau.

Les voisins soignèrent les voisins. Les esprits émergèrent de leurs longs sanctuaires secrets.

Les plantes, libres et sauvages, se mirent à pousser entre les fissures du royaume, comme pour reprendre ce qui leur avait toujours appartenu.

Jour après jour, Pléonexia se reconstruisit.

La magie dansait à nouveau au grand jour.

Les rires résonnaient dans les rues.

La vie, dans toute sa beauté indomptable, revenait au cœur du royaume.

Teigen avait tenu sa promesse.

Il avait rempli sa maison d’amour une fois encore.

Chaque esprit et chaque plante qu’il avait libérés, chaque fragment de magie retrouvé, avaient transformé ces années de vol en quelque chose de merveilleux.

Ce qui avait commencé comme un acte de rébellion était devenu un sanctuaire — une famille improbable née de la guérison, des plans audacieux, et d’un chaos joyeux et incessant.

Alors que Le Voleur à la Feuille Verte observait l’enchantement de sa maison se dissiper, regardant ses nouveaux amis entrer librement dans un monde où ils n’avaient plus besoin de se cacher…

il était comblé de joie.

Et pourtant… Teigen ne ressentit pas la victoire, mais une douleur persistante.

Le monde guérissait, oui — mais son cœur, lui, ne le ferait jamais complètement.

Sa mère, celle qui avait découvert la faiblesse des dragons — ce gris infini — avait payé le prix ultime.

Et Camélia… elle avait su que, pour le guider véritablement, elle et Saule devraient disparaître.

Ce jour-là, pourtant, Teigen ne cherchait aucune solution grandiose. Il gravissait simplement la colline familière, le dernier de ses repas du mois sous le bras.

Bien que le royaume se reconstruise, la véritable égalité semblait encore lointaine. Les cicatrices de la cupidité restaient visibles, et si la magie était revenue, les esprits du peuple devaient encore désapprendre la peur.

Il n’était pas venu pour se battre, mais pour se souvenir.

Pour honorer ceux qu’il avait perdus.

Son intention était simple : un pique-nique solitaire, en célébration de l’amour de sa mère, des sacrifices de ses amis, et de la vie qu’ils avaient reconquise.

Mais lorsqu’il atteignit le sommet, il s’arrêta net.

Une silhouette était assise sous les branches mortes de Saule, drapée dans une robe fluide couleur émeraude.

« Par la déesse ! Tu as une mine affreuse, mon homme, » lança la femme à capuche, rompant le silence.

Teigen cligna des yeux, complètement désorienté. Il est vrai qu’il avait mauvaise mine : il avait, sans surprise, glissé la tête la première dans une flaque de boue en montant.

Mais son ton direct le prit tout de même de court.

Essuyant un peu de boue de son visage, il plissa les yeux vers elle.

 « Et toi, tu es… ? » demanda-t-il, plus doucement qu’il ne l’aurait voulu.

Sa présence éveillait en lui des souvenirs flous, comme un rêve à moitié oublié.

La femme releva sa capuche.

Elle était éblouissante. Des yeux couleur de prairies ondulantes. Une chevelure auburn, riche et lumineuse comme les feuilles d’automne.

Et pourtant, malgré sa beauté, il y avait dans son regard une chaleur familière, une douceur qui lui serra le cœur.

« Je ne porte pas de nom, » dit-elle avec tendresse.

« Je n’ai ni or, ni titre… mais j’ai faim. Aurais-tu un peu de nourriture à partager ? »

Teigen baissa les yeux vers son modeste sac de pain et de fruits. Ce n’était pas grand-chose, mais l’idée de partager avec cette femme étrange lui semblait juste.

Peut-être sa compagnie allégerait-elle le poids sur sa poitrine.

Partager son repas lui paraissait un petit prix à payer.

Alors, regardant la mystérieuse beauté, il esquissa un sourire maladroit et boueux, et répondit :

 « Eh bien, bonjour, Sans Nom. »

La femme leva les yeux au ciel avec un petit sourire.

Et lui, fier, poursuivit :

« Je m’appelle Teigen — mais on me connaît surtout comme le Voleur à la Feuille Verte. Sers-toi, tout ce que j’ai est à toi. »

Le sourire de la femme s’épanouit, radieux.

Elle leva gracieusement la main, claqua deux fois des doigts, et déclara :

« Il n’y a pas de bonté trop petite. »

Au loin, un gong retentit.

Avant que Teigen n’ait le temps de comprendre, le ciel se fendit.

Des nuages lourds et sombres versèrent une pluie torrentielle — non pas douce, mais féroce, comme si les cieux eux-mêmes pleuraient.

Les gouttes frappaient la terre avec force, s’abattant sur les arbres à travers tout le royaume.

L’une d’elles — une unique pluie dorée — tomba droit sur la colline et frappa Saule.

Quelque chose changea.

La tempête s’arrêta. L’air se figea.

Ce qui restait n’était pas de la destruction, mais un voile : une brume scintillante, protectrice, s’était installée sur le royaume, diffusant une lumière douce là où le soleil brillait autrefois avec cruauté.

Teigen se tourna vers la femme, muet.

Elle était étrangère dans sa forme, mais il avait l’impression de l’avoir toujours connue.

Elle soupira, tendant la main pour caresser sa joue d’un geste si tendre que sa poitrine se serra.

C’était la même caresse qu’il avait sentie autrefois, douce comme une feuille effleurant la peau.

« Merci d’avoir toujours tenu ta promesse, Teigen, » murmura-t-elle.

« Et maintenant… que dirais-tu d’une tasse de thé ? »

Et sur ces mots, les branches de Saule frémirent.

À partir de ce jour,

le climat de Pléonexia ne fut plus jamais tout à fait le même.

Le voile protecteur jeté par les arbres demeura, sa magie apportant parfois de doux ciels gris — un écho de l’équilibre restauré grâce au sacrifice de Melissa.

En mémoire de tout ce que Teigen, Melissa et les arbres avaient accompli, le peuple de Pléonexia institua une nouvelle tradition.

Chaque printemps, lors d’un jour particulièrement nuageux, ils se rassemblaient pour célébrer les Jeux du Maladro-Boum, un festival de rires et de joyeux chaos — exactement le genre de journée que Melissa aurait adorée.

Les villageois s’y affrontaient pour prouver qu’ils étaient les plus maladroits, trébuchant gaiement sur leurs propres pieds, tandis que les arbres participaient aussi, bougeant leurs branches pour créer des obstacles farfelus, même pour les plus agiles.

Et lorsque les jeux touchaient à leur fin, tout le monde se réunissait sur la grande place, dansant et célébrant jusqu’au cœur de la nuit.

Au lever du soleil, ils levaient leurs tasses de thé vert vers le ciel, en un toast silencieux et sincère à Camélia — la malicieuse feuille verte qui avait sacrifié des années de sa vie, et même sa véritable forme, pour les éveiller.

Ils buvaient, non seulement par gratitude, mais aussi comme une promesse.

De rester sincères. De rester équilibrés.

Et de se souvenir que même le plus petit acte de bonté… peut changer le monde.


Jusqu'à ce que la prochaine histoire se déroule,

With love and wild intentions,

Lauren de Faerie Good